Voici donc une proposition de Code de déontologie des IEN-IO. Afin de lancer un débat à l'intérieur même de la profession. Chiche !

Code de déontologie pour les pratiques réflexives des inspecteurs et inspectrices chargé.e.s d'information et d'orientation (Projet)

Dans une orientation de plus en plus sujette aux lois du marché, nous avons l’intime et la ferme conviction que le service public d’orientation doit mieux expliciter ses pratiques, clarifier et rendre plus visibles encore ses actes professionnels, et à commencer par les inspecteurs et inspectrices compétentes, dans leur domaine propre d’activité. Ce sera une source de progrès, de modernité et de qualité pour tous. En outre, nous pensons que chacun des acteurs doit être reconnu comme interlocuteur valable. C’est à cette condition qu’à son niveau, individuellement ou collectivement, il contribuera à la mise en œuvre de pratiques toujours plus efficientes, plus adaptées, plus réflexives et plus justes.



Les dispositions du présent Code de déontologie s’imposent à tous les inspecteurs.trices de l’Éducation nationale chargés/es d’information et d’orientation. Elles sont présentées à l’ensemble des partenaires de la communauté éducative, mises en œuvre par les inspecteurs.trices en poste, et font l’objet d’une information et d’une formation approfondies pour les inspecteurs et inspectrices.

La promotion des actions pédagogiques, éducatives d'information, de conseil et d'insertion

1. L’inspecteur.trice a le devoir de faire progresser les pratiques de tous les enseignants et des intervenants dont il a la responsabilité directe (conseillers d’orientation-psychologues) ou indirecte (directrices et directeurs de CIO, coordonnatrices et coordinateurs de la mission de lutte contre le décrochage scolaire, divers chargés de mission).

2. L’inspecteur.trice a le devoir de participer activement au repérage, chez les enseignants et conseillers d’orientation-psychologues (COP), de toutes les initiatives pédagogiques ou professionnelles destinées à améliorer la qualité de la prise en charge des élèves et des consultants et qui produisent des effets positifs sur leurs apprentissages, leur développement, leur orientation, leur insertion et la réussite des objectifs de l’école.

3. L’inspecteur.trice a le devoir d’accueillir et d’examiner les propositions innovantes, de se les faire présenter et de proposer des dispositifs pour en observer les effets.

4. L’inspecteur.trice a le devoir de promouvoir des propositions d’organisations pédagogiques ou professionnelles susceptibles d’améliorer les pratiques des enseignants et des COP et les résultats des élèves, compatibles avec les finalités du système scolaire définies dans la loi d’orientation du 10 juillet 1989, la loi handicap du 11 février 2005, la loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école du 23 avril 2005, la loi relative à l’orientation et à la formation tout au long de la vie du 24 novembre 2009 et la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'Ecole du 9 juillet 2013.

5. Dès lors qu’il ou elle recueille des informations sur des élèves ou des personnels dont il.elle a la responsabilité et qui concernent leur intégrité morale ou physique, a fortiori lorsqu’elles le conduisent à instruire une enquête administrative, l’inspecteur.trice a le devoir de se conformer au secret professionnel.

6. L’inspecteur.trice a le devoir de présenter à l’ensemble de la communauté éducative les résultats des travaux de recherche et des formations entrepris avec les équipes pédagogiques ou professionnelles dont il.elle a la responsabilité pour qu’ils puissent être discutés, repris par d’autres, enrichis.

La gestion des personnels, la valorisation des ressources humaines

7. L’inspecteur.trice a le souci permanent de la formation et de la qualification des personnels dont il a la responsabilité. Il aide à la réalisation de leurs projets professionnels et propose des actions de formation ou des orientations professionnelles qui valorisent les acquis et les compétences de chacun.

8. L’inspecteur.trice favorise l’accès de tous les personnels dont il.elle a la responsabilité aux informations et aux savoirs nouveaux qui pourraient les aider dans leurs missions. Pour cela, il.elle a le devoir de mettre en place, seul ou en équipe d’inspecteurs, des dispositifs permettant d’atteindre ces objectifs.

9. L’inspecteur.trice s’engage à n’émettre aucun jugement de valeur sur des personnes ou sur des projets avant d’avoir une connaissance approfondie des dossiers en cause.

10. L’inspecteur.trice s’engage à protéger tous les conseillers.ères d’orientation-psychologues éprouvant des difficultés professionnelles parce qu’attaqués.es dans leur dimension humaine ou atteints dans leur intégrité.

11. L’inspecteur.trice a le devoir de susciter et de faciliter l’expression des conseillers.ères d’orientation-psychologues dont il.elle a la responsabilité.

12. L’inspecteur.trice s’engage à écouter les conseillers/ères d’orientation-psychologues ainsi que tous les partenaires, sans pour autant attirer des confidences qui auraient la manipulation pour objet.

13. L’inspecteur.trice a le devoir de traiter équitablement tous les personnels dont il.elle a la responsabilité, quels que soient leur statut, leur ancienneté, leur âge et leur sexe.

14. L’inspecteur.trice veille à exercer son autorité avec impartialité, notamment sans se livrer à des débordements, qu’il s’agisse d’enthousiasme ou d’aversion, à l’égard des personnes ou des projets.

Les relations avec les partenaires et les usagers

15. L’inspecteur.trice a le devoir de résister à toute pression ou subordination idéologique, religieuse ou politique qui serait susceptible d’entraver la neutralité de ses actes dans le cadre de l’Ecole de la République.

16. L’inspecteur.trice a le devoir de proposer les conditions de mise en œuvre d’un partenariat de coopération qui permette des interactions entre tous les intervenants et partenaires de l’établissement public local d'enseignement (EPLE) et des CIO, dans le respect de la mission de l’École.

17. Parce que le champ d’application des compétences de l’inspecteur.trice dépasse le seul domaine des CIO ou des EPLE, il.elle veillera à développer, avec les autres cadres de son administration, avec ceux d’autres administrations et plus généralement avec l’ensemble de ses partenaires, notamment économiques et sociaux, des échanges fondés sur le respect d’une relation humaine privilégiant le sens de la coopération, avec le souci permanent de promouvoir la qualité du système éducatif.

18. Fondamentalement pénétré du respect d’autrui, l’inspecteur.trice a tout à la fois un devoir de discrétion et d’information de chacun des partenaires concernés, sans exclusive.

19. L’inspecteur.trice a le devoir de provoquer et d’animer des rencontres régulières d’échanges d’informations avec les responsables des fédérations de parents d’élèves.

20. L’inspecteur.trice a le devoir de prendre le temps de recevoir et d’entendre, quand ils en font la demande, et en respect des attributions des COP, des CIO et des EPLE, les parents ou responsables légaux des élèves scolarisés dans le second degré.

21. L’inspecteur.trice a le devoir de dire ce qu’il fait ; il a aussi celui de faire ce qu’il dit et de rendre compte de ce qu'il fait et dit.

Les avis sur les personnels

22. L’inspecteur.trice s’engage à ne jamais envisager comme irrémédiable l’insuffisance professionnelle repérée chez l’un.e de ses collaborateurs.trices, COP, directeur de CIO ou intervenant dont il a la responsabilité.

23. L’inspecteur.trice a le devoir de proposer des éléments de solution concrets et réalistes pour aider tous les personnels dont il.elle a la responsabilité à évoluer et à progresser.

24. En cas de carence avérée, d’une défaillance ou d’un comportement malveillant chez l’un des professionnels dont il a la responsabilité, l’inspecteur.trice a le devoir de prendre toute décision susceptible de mettre fin aux risques alors encourus par les enfants ou consultants.

25. Dans le cas où l’inspecteur.trice serait amené.e à proposer une sanction concernant l’activité professionnelle d’un des personnels dont il.elle a la responsabilité, il.elle a le devoir de s’assurer, au cours d’un entretien ou par tout autre mode d’information approprié, que celle-ci ne sera pas vécue comme un possible règlement de comptes.

26. L’inspecteur.trice a le devoir de solliciter l’avis d’au moins un de ses pairs pour toute proposition de sanction qu’il.elle serait amené.e à formuler.

27. L’inspecteur.rice ne doit jamais humilier, par des actes ou des propos, une personne dont il.elle peut être amené.e à critiquer le travail.

28. L’inspecteur.trice a le devoir de rédiger des rapports correspondant à chacun des objectifs assignés et définis pour ses différentes visites.

29. À la suite d’une visite, l’inspecteur.trice a le devoir de rédiger des rapports qui distinguent explicitement les informations destinées à l’administration et celles qui ont vocation à aider les conseillers.ères d’orientation-psychologues à mieux comprendre leur fonctionnement professionnel afin qu’ils.elles les améliorent.

30. Dans le cas d’une inspection d’équipe, l’inspecteur/trice a le devoir de rendre compte équitablement de la part du travail de chacun des membres de l’équipe dans la mise en œuvre collective du projet ou du programme d’activités du CIO.

31. L’inspecteur.trice s’engage à utiliser les données recueillies dans les EPLE et les CIO pour servir l’intérêt des élèves, et conseiller les enseignants et les COP en ayant le souci permanent d’améliorer leur pratique professionnelle.

32. L’inspecteur.trice s’interdit de diffuser ou de falsifier des informations qui porteraient préjudice aux personnels dont il.elle a la responsabilité en servant ses seuls intérêts.

33. La rédaction des rapports de visite d’inspection doit être explicite et précise, afin que soit limitée toute interprétation des conclusions. L’inspecteur.trice laisse aux personnels inspectés la possibilité d’émettre oralement et par écrit un avis personnel contradictoire sur les constats et préconisations qu’il a formulés.

34. L’inspecteur.trice transmet un rapport d’activité et un compte rendu de ses visites au recteur d’académie, responsable de la gestion de la carrière des conseillers.ères d’orientation-psychologues.

35. L’inspecteur.trice a le devoir de considérer chacun des interlocuteurs comme un être humain responsable et non comme un objet d’étude ou d’analyse.

36. L’inspecteur.trice a le devoir de toujours citer ses sources en matière de propositions pédagogiques.

Les visites d'inspection, les audits

37. L’inspecteur.trice a le devoir d’effectuer régulièrement des visites dans les EPLE et les CIO, seul/e ou en compagnie de collègues, et de s’entretenir avec tous les personnels des CIO.

38. L’inspecteur.trice a le devoir de préparer les visites qu’il.elle doit faire dans les CIO et les EPLE.

39. Au cours de l’entretien qui suit une visite d’inspection individuelle, l’inspecteur.trice a le devoir de demander au conseiller d’orientation-psychologue s’il souhaite être accompagné d’un ou plusieurs collègues pour resituer son travail dans le cadre d’une préparation collective. Si le COP ne le souhaite pas, l’inspecteur a le devoir de l’interroger sur la place et le rôle qu’il tient dans la mise en œuvre du projet d’EPLE ou de CIO.

40. Au cours de ses visites d’inspection et des entretiens qu’il conduit, l’inspecteur.trice s’engage à distinguer la part de travail individuel et collectif prise par les COP dans l’élaboration et la mise en œuvre du projet d’EPLE ou de CIO.

41. Avant toute visite, l’inspecteur/trice a le devoir d’informer les conseillers.ères d’orientation-psychologues sur les modalités de travail qu’il.elle a définies lors de cette visite. Les membres des équipes pédagogiques et éducatives doivent être prévenus afin que tous se rendent disponibles et puissent, à leur tour, préparer cette visite.

42. Si une inspection concerne un CIO ou un EPLE dans lesquels l’inspecteur.trice s’est particulièrement investi/e pour accompagner des travaux de recherche ou promouvoir une action pédagogique, il/elle se fera accompagner, pour cette visite, par un inspecteur d’une autre zone géographique.

43. L’inspecteur.trice n’a pas le droit d’exiger d’un enseignant ou d’un COP ce qu’il.elle ne serait pas capable de faire lui-même/elle-même. En visite dans une classe, ou en présence d’un élève ou d’un groupe d’élèves avec un enseignant ou un COP, il.elle a le devoir de se poser la question de savoir ce qu’il.elle ferait s’il (ou si elle) était à la place de l’enseignant ou du COP pour venir en aide à tel ou tel élève ayant des difficultés.

44. L’inspecteur.trice s’impose de dissocier explicitement les visites de contrôle de conformité et les visites portant sur l’évaluation des pratiques des enseignants et leur accompagnement professionnel, notamment dans le cas de l’adaptation au métier des néo-COP.

La recherche, les études et la formation permanente

45. L’inspecteur.trice a le devoir de conduire et d’accompagner des actions de recherche avec différentes équipes pédagogiques et éducatives, en s’assurant d’une méthodologie rigoureuse et en procédant à une évaluation des effets repérés sur les apprentissages réalisés par les élèves, les consultants et les jeunes, sur leur comportement global mais aussi sur les modifications des pratiques professionnelles des personnels.

46. L’inspecteur.trice a le devoir d’approfondir ses propres connaissances en proposant des communications, lors de colloques ou de séminaires, et en s’inscrivant lui-même dans une équipe de recherche. Il est de sa propre responsabilité et de sa compétence professionnelle de s’engager à rédiger, seul ou en équipe, des articles, des études, des essais et des ouvrages, mais aussi à participer, en fonction de ses compétences spécifiques, à la réalisation de toutes sortes d’outils à caractère pédagogique, didactique et éducatif.

47. L’inspecteur.trice a le devoir de participer activement, en tant que stagiaire, à des formations en cours d’emploi couvrant les différents champs professionnels de ses missions, ces formations pouvant être proposées par le ministère de l’éducation nationale de la jeunesse et de la vie associative, par d’autres ministères, ou par des organismes externes, reconnus pour leurs compétences.

48. L’inspecteur.trice a le devoir de veiller particulièrement à ce que des travaux conduits par différentes équipes pédagogiques, éducatives ou universitaires sur un projet de recherche et d’étude communs soient coordonnés, pour éviter du travail répétitif inutile et surtout pour enrichir la réflexion commune.

Note. Cette proposition est largement inspirée de Dominique Sénore, Pour une éthique de l’inspection, ESF éditeur, 2000, pages 139-147, de Gilbert Longhi, Pour une déontologie de l’enseignement, ESF Editeur, 1998 et de Donald Schön, Le praticien réflexif, à la recherche du savoir caché dans l’agir professionnel, Editions Logiques 1993. Ces trois auteurs ont, il y a quelques années, profondément marqué la réflexion éthique dans le champ éducatif. Elle est évidemment à amender et à débattre avant validation et publication éventuelle. En juin 2023, dix ans après, cette proposition est restée lettre morte. ■

Ce mot a été amodié le 22 juin 2023