David Le Breton poursuit : Quand on prend son vélo, on est immergé dans son histoire personnelle, on se souvient de son apprentissage, de son premier vélo… On est dans un rapport plus réflexif avec son vélo qu’avec sa voiture ou sa trottinette électrique. Il y a toujours une attention très affective portée à l’objet. À vélo, il y a une célébration de tous les sens. Vous voyez le monde tout entier, vous respirez les tilleuls, vous êtes actifs et dans une conscience du présent. Le confinement nous a ramenés au désir de nous réapproprier sensoriellement, physiquement, un monde qui nous avait manqué.

Se réapproprier sensoriellement le monde

Le confinement et les contraintes de déplacements nous ont en effet amenés à revisiter nos valeurs. Lors du premier confinement, au printemps 2020, on a redécouvert le silence. Il y a eu une revanche de cette saveur du monde qui nous est mesurée à cause de la circulation automobile. Tout cela nous a ramenés au vélo et à ce désir de nous réapproprier sensoriellement, physiquement, un monde qui nous avait manqué. En retrouvant le vélo, on a aussi retrouvé notre enfance, ce qui participe d’une dimension sentimentale très forte.

Éloge de la flânerie

Le vélo c’est le jeu de vivre, c’est redevenir artisan de soi et de son rapport au monde alors que la voiture instruit au contraire la passivité et l’aseptisation des sens. Le vélo fait l’éloge de la flânerie, de la lenteur et de l’attention au monde et à soi. Comme la marche, c’est une manière de prendre son temps et ne plus laisser le temps nous prendre. Le vélo est une flânerie que le monde ultralibéral récuse. Le vélo fait au contraire l’éloge de cette flânerie, de la lenteur et de l’attention au monde et à soi.

Pour flâner mieux et plus loin

Le Breton D. (2020), En roue libre, une anthropologie sentimentale du vélo, éditions Terre urbaine