Maison-mère, maison-père
Par Jacques Vauloup le mercredi 22 juillet 2020, 04:17 - À propos de l'auteur - Lien permanent
Ma géographie existentielle, énonce Thierry Paquot, philosophe de l'urbain, n'est pas globalisée, mais planétaire, je suis d'ici et d'ailleurs, mais je possède des emplacements familiers où je me rends périodiquement − lieux habités par des amis, sites appréciés pour leur beauté, leur vastitude et leur silence − et un domicile fixe dans la banlieue parisienne, depuis lequel je contacte les membres des réseaux auxquels je suis branché et qui rhyzoment toute la Terre en des circonvolutions proliférantes et jamais achevées
(page 216).
Il poursuit ainsi :
«Conscient de la préoccupation environnementale, je pense que chaque citadin se doit d'inaugurer une démobilité progressive selon son emploi et ses contraintes : pourquoi multiplier les déplacements alors qu'on peut grandement les limiter en utilisant mieux les nouvelles technologies de l'information et de la télécommunication ?
»Pourquoi ne pas opter pour les mobilités douces − marche, bicyclette ? Pourquoi ne pas développer le télétravail ? Pourquoi ne pas regrouper ses rendez-vous ? Pourquoi ne pas diminuer le temps de travail, le partager ou l'assurer sur trois jours afin de rendre viables les villages, sans les transformer en cités dortoirs et tout en leurs apportant une diversité générationnelle et professionnelle ?
»Pourquoi ne pas miser sur une polyactivité, par exemple bioagriculteur et graphiste, et concentrer ses activités sur des plages horaires stables et saisonnières ? Pourquoi ne pas consommer en priorité les produits locaux, privilégier le commerce de proximité ou la livraison groupée à domicile ?
»Pourquoi ne pas inciter à la coopération tout ce qui peut l'être ? Pourquoi ne pas attribuer à un même bâtiment plusieurs usages différés dans le temps ? Et à la ville et ses alentours d'autres horaires, grâce aux maisons des temps et aux banques du temps ?
Pourquoi ne pas convertir les immeubles et autres constructions aux normes environnementales en y intégrant la dimension temporelle ? Pourquoi ne pas opter pour une chronotopie qui tienne compte des rythmes urbains contrastés ?»■
Pour aller plus loin
Topophile, l'ami.e des lieux, la revue des espaces heureux
« Être topophile, c’est avoir de l’empathie pour les lieux, c’est vouloir les protéger lorsqu’ils sont d’une beauté fragile, c’est vouloir les réparer quand ils sont abîmés, c’est vouloir les transformer pour les rendre accueillants ». Source : Topophilie | 30 avril 2020, La topophilie selon Simon Teyssou.
Ndlr : La photographie accompagnant ce billet est la maison où je suis né, quelque part en Normandie rurale, sur la nationale, à quelques hectomètres du village et de la Mayenne. Maison-mère, les cinq enfants de la fratrie dont je fais partie y sont nés, y ont vécu leur enfance et leur adolescence ; une grande maison à laquelle maman tenait beaucoup, avec des bâtiments annexes, un jardin potager, un verger, et de ce fait très exigeante en entretien pour une famille aux revenus modestes. Maison-père aussi, lieu de l'activité professionnelle paternelle. Maison-famille et maison-métier mêlées. De nombreux souvenirs personnels y sont attachés.
Ce mot a été amodié le 23 juillet 2021 puis le 18 mai 2023