Rappelons d'abord que le passage à Ville 30 n'est en aucun cas une lubie écolo de plus, mais la condition sine qua non d'une ville sans thrombose, aérée, oxygénée, sécure, silencieuse, respectueuse des différents modes de déplacement urbains. D'une ville apaisée. Après les innovateurs (2000-2010) et les premiers adeptes (2010-2020), vient le temps de la majorité prudente mais sensible aux attentes des urbains et péri-urbains.

La diffusion se poursuit par effet de voisinage, dans les Hauts-de-Seine, autour de Fontainebleau, Rennes, Vannes, la Rochelle, Strasbourg, Toulouse, Lille, en Bretagne, le long de la Loire... Des villages apaisent leur traversée, des petites villes touristiques de bord de mer ou de montagne gèrent des flux de piétons plus importants et travaillent leur attractivité. Des métropoles s'y mettent aussi : Grenoble et ses 45 communes (2017), Bruxelles et son agglomération (2020), Paris (2021). Plus au Sud, l'Espagne entière devait marquer les esprits (2020).

Des aménagements et des comportements

On ne décrète pas le changement de comportement par des panneaux et des ukases administratifs, fussent-ils urbains. Mais ils peuvent y aider si conjointement se développe une méthode de gouvernance urbaine qui associe les habitants au dispositif et, à des échéances perceptibles par eux, leur procure une véritable appréciation de mieux-être individuel et collectif.

Donner des échéances calendaires et les respecter, c'est d'abord identifier les axes pouvant rester à 50 km/h (ceux pouvant accueillir des aménagements cyclables séparatifs) ; élaborer ensuite un plan de hiérarchisation des espaces distinguant des zones de rencontre et des aires piétonnes à l’intérieur de la zone 30 ; refondre enfin le plan de circulation afin de réduire le trafic de transit dans ces zones apaisées.

Comme l'indique avec grande justesse le marcheur, cycliste, sociologue, anthropologue et essayiste de talent David Le Breton, La limitation de la vitesse de circulation automobile à 30 kilomètres par heure est une nécessité dans les villes pour fluidifier le trafic et le rendre moins dangereux pour les piétons et les cyclistes, d'autant qu'une vitesse moindre induit davantage de vigilance et une aisance de circulation pour tous ; elle facilite le respect des priorités. Le Code de la route doit être un code de civilité, de mutuelle reconnaissance entre les usagers et s'adjoindre éventuellement un code de la rue, comme en Belgique, devenu de plus en plus nécessaire avec l'apparition d'engins électriques nettement plus rapides que les vélos et d'autant plus dangereux pour les piétons. On ne saurait mieux dire.

Ce mot a été modifié le 24 mai 2021

Pour aller plus loin

Réduire la vitesse à 30 km/h dans les zones peuplées est l'une des mesures les plus efficaces pour surmonter la mortalité routière. Tribune de Jean Todt, envoyé spécial des Nations unies pour la sécurité routière, Le Monde, 24 mai 2021. Jean Todt a été coureur automobile, PDG du groupe Ferrari, directeur de l'écurie Ferrari de F1.